Cette fierté réelle est positive
Razika Adnani, extrait de l’ouvrage La nécessaire réconciliation, UPBlisher, deuxième édition 2017
Tous, nous connaissons ces moments agréables où l’admiration nous submerge, quand par exemple nous visitons un lieu historique et que nous prenons conscience de la grandeur du peuple qui l’a bâti. Quand cette histoire est la nôtre, c’est la fierté qui nous envahit.
Dans les moments de doute, le besoin de retrouver ce sentiment se fait sentir. Se tourner alors vers son passé et faire revivre les moments de gloire donnent à chacun d’entre nous l’élan dont il a besoin pour croire en lui et rebondir. L’histoire nous aide non seulement à comprendre le présent mais aussi à construire le futur. Par là même, nous comprenons mieux pourquoi les peuples accordent une telle importance à leur histoire et préservent leurs sites historiques[…].
L’histoire nous aide non seulement à comprendre le présent mais aussi à construire le futur. Par là même, nous comprenons mieux pourquoi les peuples accordent une telle importance à leur histoire et préservent leurs sites historiques.
Comment définir la fierté ? Je dirais que c’est le sentiment de satisfaction de ce que nous sommes. On l’acquiert par l’accomplissement d’un travail dont le résultat nous procure un immense contentement. Cette fierté, réelle, est positive. Elle nous permet de marcher la tête haute et d’avoir la confiance nécessaire pour avancer vers l’avenir, car la confiance en soi nourrit l’imagination, outil indispensable à toute créativité[…].
Pourtant, les Algériens veulent être fiers. Rappelons nous l’élan qui les a soulevés quand leur équipe a battu l’Égypte aux éliminatoires de la coupe du monde defootball. Les rues des villes et des villages en liesse étaient le symbole d’un peuple fier et heureux qui a besoin de croire en lui.
Cette fierté, réelle, est positive. Elle nous permet de marcher la tête haute et d’avoir la confiance nécessaire pour avancer vers l’avenir, car la confiance en soi nourrit l’imagination, outil indispensable à toute créativité.
L’Algérie a la chance d’avoir une histoire riche dont le peuple algérien a toutes les raisons de s’enorgueillir. Héritière de cette histoire, la jeunesse a de quoi y puiser pour retrouver la confiance et relever les défis à venir. Dans les moments de doute et de défaite, le besoin de se ressourcer dans le passé devient plus fort encore. Celui-ci raconte comment hier leurs ancêtres ont su gagner leur place parmi les grandes nations et leur prouver qu’ils sont un grand peuple. Aux Algériens aujourd’hui de mettre leurs pas dans ceux de leurs aïeux[…].
Pour les peuples du Maghreb, abstraction faite de tout ce que leurs ancêtres ont pu réaliser, s’ils n’avaient qu’un seul motif d’être fiers d’eux, ce serait la reconnaissance d’avoir toujours lutté pour leur liberté, leur dignité et leur existence[…].
Quand les choses vont mal et que la réussite tarde à venir, si le passé ne transmet plus rien de positif, le doute peut facilement s’installer dans les cœurs. Nous sommes alors tentés de penser que notre situation n’est que la continuité historique de notre échec. Quand on en arrive à un tel manque de confiance en soi, que reste-t-il sinon la résignation pour nous consoler ?[…].
Dans les moments où le présent vacille et où le futur est incertain que le rôle du passé devient encore plus prégnant. Au momentoù il doit prendre de grandes décisions, un peuple qui se retourne vers son passé y puisera volonté et détermination.
Dans les moments où le présent vacille et où le futur est incertain que le rôle du passé devient encore plus prégnant. Au moment où il doit prendre de grandes décisions, un peuple qui se retourne vers son passé y puisera volonté et détermination. Croire que les ancêtres ont tout fait, et qu’il n’y a plus rien à faire, est la manière la plus négative qui soit de lire l’histoire et de mettre en valeur leur œuvre. Nietzsche a critiqué fortement cette « histoire monumentale » qui rend les peuples incapables d’inventer de nouvelles valeurs. La grandeur des ancêtres, pour lui, est moins dans l’œuvre elle-même que dans sa capacité à inventer l’avenir. Porter un tel regard est la meilleure manière de valoriser l’histoire. Comme le dit Hegel : « Chaque époque, chaque peuple se trouve dans des conditions si particulières, forme une situation si particulière, que c’est seulement en fonction de cette situation unique qu’il doit se décider : les grands caractères sont précisément ceux qui, chaque fois, ont trouvé la solution appropriée »[…].
Pour que l’histoire participe à l’émergence de cette volonté d’inventer, elle doit être l’exemple qui nous murmure en permanence « si nos ancêtres ont pu, alors nous aussi nous pouvons ». C’est à cette unique condition que la fierté que nous éprouvons à l’égard de notre passé est importante. Mais la fierté est souvent assimilée à l’orgueil. De ce fait, elle est méprisée et critiquée. Pourtant, que serions-nous sans cette fierté qui nous renvoie une image positive de nous ? Que peut-on espérer d’une personne qui se méprise ?
Que serions-nous sans cette fierté qui nous renvoie une image positive de nous ? Que peut-on espérer d’une personne qui se méprise ?
Si fierté ne veut pas dire orgueil, car s’y ajoutent la volonté et l’humilité, ne vaut-il pas mieux être un peu orgueilleux et savoir entreprendre que se mépriser et se laisser aller à l’inertie ? Il faut en revanche préciser que cette fierté n’est pas celle qui, s’enracinant dans le passé, empêcherait d’entreprendre et de construire sa propre histoire, mais celle qui pousse à travailler, qui garantit à un peuple sa place parmi les nations et qui lui permet de prendre en main son propre destin. Cependant, tirer fierté de son histoire ne signifie en aucun cas la manipuler, mais savoir en reconnaître les moments de gloire et en assumer les moments de défaite. La quête de la vérité doit demeurer l’objectif de tout travail historique. Elle est une marque de respect autant envers les générations passées qu’envers celles à venir”