Comment le discours religieux détourne le principe de l’égalité
Parmi les messages que les internautes ont envoyés comme réaction à la publication de l’article de Razika Adnani : « L’islam et le principe d’égalité » : les femmes et les hommes sont égaux, mais devant Dieu.
Il est important d’analyser cette idée, car elle revient très souvent dans le discours de beaucoup de musulmans dès lors que la question de l’égalité est posée. Évidemment rien n’empêche de croire que les femmes et les hommes sont égaux devant Dieu, ce qui pose problème c’est le fait que ceux qui l’affirment le font pour contester, au nom de l’islam, toute revendication pour une égalité entre les femmes et les hommes. Cette idée représente également et d’une manière claire le phénomène du blocage de la raison dans la pensée des musulmans. Autrement dit, c’est un bon exemple pour comprendre comment ils cessent de raisonner dès lors qu’il s’agit de l’islam, au point de se contredire avec leur propre religion.
Il faut donc rappeler que lorsqu’on aborde la question de l’égalité entre les femmes et les hommes, c’est de l’égalité juridique qu’il s’agit. Les femmes et les hommes sont juridiquement égaux quand la loi les traite de la même manière, en leur accordant les mêmes droits et leur exigeant les mêmes devoirs. Quand une femme et un homme divorcent par exemple, le juge les traite de la même façon sans aucune distinction liée au fait que la personne soit un homme ou une femme. Ce n’est pas le cas de l’Algérie et des autres pays musulmans. Le code algérien de la famille.continue d’accorder aux hommes davantage de droits qu’ils n’en accordent aux femmes. Alors que la Constitution stipule : “Les institutions de la République ont pour finalité d’assurer l’égalité en droits et en devoirs de tous les citoyens et citoyennes en supprimant les obstacles qui entravent l’épanouissement de la personne humaine et empêchent la participation effective de tous à la vie politique, économique, sociale et culturelle”.article 35, et que “Les citoyens sont égaux devant la loi et ont droit à une égale protection de celle-ci, sans que puisse prévaloir aucune discrimination pour cause de naissance, de race, de sexe, d’opinion ou de toute autre condition ou circonstance personnelle ou sociale” article 37.
La question de l’égalité concerne également l’égalité en société qui consiste à avoir les mêmes droits qui ne sont pas explicitement mentionnés dans les textes de loi. Par exemple, le droit d’utiliser l’espace extérieur de la même manière. La Constitution algérienne garantit dans son article 49 le droit à toute personne, donc aux femmes et aux hommes, de circuler librement sur le territoire national.
En Algérie comme dans tous les pays musulmans, les femmes n’ont pas le même droit que les hommes de marcher librement dehors, de profiter en sécurité de la nature, du ciel et du soleil alors que la nature est un bien de toute l’humanité. Les femmes sont également jugées pour leur comportement davantage que les hommes. Comme si les hommes avaient le droit à l’erreur mais pas les femmes.
Le principe d’égalité concerne donc le monde dans lequel les êtres humains vivent et les règles avec lesquelles ils organisent leur société. Ceux qui évoquent une égalité devant Dieu pour protester toute revendication d’égalité juridique et sociale entre les femmes et les hommes sont donc hors sujet, car ils se placent sur un autre registre, celui du divin et de la métaphysique.
Ce n’est pas la seule erreur de cohérence qu’ils commettent, car dans le Coran les femmes et les hommes n’ont pas les mêmes droits. Ils ne sont donc pas égaux. Or, le Coran est, selon la foi musulmane, la parole sacrée de Dieu. Ainsi, prétendre que les hommes et les femmes sont égaux devant Dieu revient logiquement à dire que le Coran n’est pas sa parole, ce qui va à l’encontre des principes fondateurs de la religion musulmane. Ce genre de contradictions caractérisant le discours religieux sont nombreuses. Le problème, c’est que beaucoup les répètent sans réfléchir.
Cependant, cela n’est pas une raison pour pérenniser les discriminations à l’égard des femmes. Les musulmans ont toujours négligé des recommandations coraniques qui ne correspondaient pas à leur conception de la société. Les législateurs à partir du XIXe siècle ont aboli plusieurs lois qui étaient d’origines religieuses car elles ne correspondaient pas à la dignité humaines tel l’esclavage et le système des dhimmis.
Pour en finir, supposons qu’une égalité devant Dieu existe réellement, cela ne doit pas être un raison pour empêcher de revendiquer l’égalité juridique et sociale pour les femmes dans les sociétés musulmanes, car celle-ci personne ne peut prétendre qu’elle existe.
Razika Adnani
3 Commentaire(s)
Le sujet n’est pas si compliqué si l’on consulte la définition ou but du contrat de mariage chez les 4 écoles juridiques islamiques (malékite, hanbalite etc….)
Quand le mari n’a pas le devoir de supporter les frais de son épouse malade. Que reste il de la considération de la femme ? Soyons réaliste !!!
Même l’achat du linceul de l’épouse n’est pas normalement à sa charge !!!!
Afin de comprendre ce principe il est à prendre l’exemple d’un locataire d’une maison. Il jouit de la dite maison, mais n’est pas responsable de son entretien.
Merci Madame Adnani. Dans toutes vos analyses, la lucidité, la perspicatié par la mise en relief de cette perversité enfouie dans de nombreuses sourates du Coran est absolument salutaire. Le texte du Coran est foncièrement machiste, mysogine et patriarcal. Vos analyses, à l’instar de tous les islamologues sont extrêmement précieuses par la clarté de leur présentation et une certaine facilité de compréhension compte tenu de votre pédagogie.
Merci à vous Badredine