Imane Khelif n’est pas un homme

Imane Khelif, le 3 août 2024. | MIGUEL TONA, EPA, MAXPPP

Le lundi 5 août, un jour avant qu’Imane Khelif ne dispute la demi-finale olympique des 66 kg face à la Thaïlandaise Suwannapheng, la Fédération internationale de boxe  réaffirme ce qu’elle a annoncé en 2023, c’est-à-dire que la boxeuse algérienne Imane Khélif ainsi que la Taïwanaise Lin Yu-ting étaient atteintes d’hyperandrogénie selon le résultat médical des tests sanguins. Pour elle, ces deux femmes sont des hommes.

 L’hyperandrogénie signifie une présence élevée d’androgènes (hormones sexuelles masculines) et notamment la testostérone. Celle-ci est produite par le corps de la femme et celui de l’homme. On parle d’’hyperandrogénie quand elle est produite d’une manière élevée notamment chez la femme, ce qui peut être due à une anomalie ou provoquée par une maladie.

Quand il s’agit d’une femme et que celle-ci est née fille, c’est-à-dire qu’elle a un appareil génital féminin, elle est une femme avec une présence élevée d’androgènes. Affirmer qu’elle est un homme c’est lui nier toute sa féminité, c’est considérer que les critères de féminité s’éclipsent totalement devant la présence de critères de masculinité.

Parmi les personnalités connues qui ont alimenté la polémique et le harcèlement contre Imane Khelif, il y a l’écrivaine J.K. Rowling, auteure de la célèbre série littéraire Harry Potter. Sur son compte tweeter datant du 1 er aout elle a dénoncé le Comité international olympique qu’elle a qualifié d’établissement sportif misogyne, car selon elle il a permis à un homme de taper sur une femme. Or, ce qui est misogyne, c’ est de considérer qu’une personne est un homme dès lors que les critères de masculinité sont présents en elle et cela quel que soient ceux de féminité.

Une personne qui est née femme n’est pas un homme quand bien même elle aurait une présence élevée d’androgènes. Imane Khelif n’est donc pas un homme, mais une femme. Cette histoire nous rappelle la difficulté que rencontrent les femmes dans le monde du sport. Une femme musclée et forte, au-delà des limites qu’on pense être celles des femmes, est suspectée d’être un homme. Assurément parce que nous sommes encore influencés par l’idée que le corps d’une femme est flasque « humide, mou et poreux » comme le décrit le célèbre médecin Hippocrate de Cos et celui d’un homme « sec, musclé et ferme », idée pourtant démentie non seulement par le corps des athlètes femmes, mais par l’expérience de la pratique de l’activité sportive et la transformation du corps qui en résulte aussi bien pour l’homme que la femme.  

Pour ma part, j’ai regardé le match pour la demi-finale qui l’a opposé à la Thaïlandaise Suwannapheng. J’ai observé avec autant d’attention et d’objectivité possible tous les gestes d’Imane et son comportement et à aucun moment je n’ai vu un homme boxer une femme. En boxe, un homme face à une femme ne peut pas passer inaperçu. À moins que la Thaïlandaise soit également un homme, mais une telle probabilité est presque impossible. Ainsi, on ne peut que féliciter Imane pour son courage et sa performance malgré le harcèlement qu’elle subit et lui souhaiter la médaille d’or et un titre olympique pour elle, pour l’Algérie et tous les Algériennes et Algériens.  

Razika Adnani